vendredi 14 juin 2019

Jeudi 11 janvier 2018


Chère Catherine Millet,
A toi qui a déclaré "C'est mon grand problème, je regrette beaucoup de ne pas avoir été violée. Parce que je pourrais témoigner que du viol on s'en sort"
Moi, je regrette d’avoir été violée, alors, je veux bien échanger avec toi… Je te donne mes viols, et tout ce qui va avec :
Je te donne mes tentatives de suicide, mes mutilations, ma boulimie
Je te donne ce sentiment d’être sale et souillée qui me colle à la peau
Je te donne ma frustration, ma colère, mon incompréhension
Je te donne mon isolement, ma peur, ma détresse,
Je te donne le silence qui m’a étouffée pendant longtemps parce que j’avais peur de parler, parce que j’avais honte d’en parler
Je te donne mon incapacité à faire confiance aux autres, mon incapacité à croire en moi
Je te donne toutes mes années de dépression, mes insomnies, ma peur du noir et mes cauchemars
Je te donne mes orgasmes, car oui j’en ai, mais je ne te donne pas n’importe lesquels, je te donne ceux dont je ne veux pas, dont je ne veux plus car ils apportent avec eux le souvenir boueux de ce que mon corps a vécu. Voilà, je te donne ces orgasmes-là, et je garde les autres, les meilleurs, ceux que j’arrive à avoir sans qu’aucun mauvais souvenir ne les gâche.
Je te donne avec plaisir tout ce temps perdu à questionner mon passé, revenir en arrière, essayer de me souvenir, revenir sur les blessures et tenter de les guérir
Je te donne ma plainte classée sans suite, la douleur qui va avec, la sensation d’injustice et d’incompréhension
Je te donne ma colère et mon dégoût face à tes discours nauséabonds, ces propos que toi et tes quatre-vingt-dix-neuf amies vous nous jetez à la figure comme si vous étiez plus fortes, plus capables, plus futées que moi ou d’autres pour vous en sortir.

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