samedi 3 décembre 2022

Samedi 03 décembre 2022

 

Ce monde n'est pas fait pour les victimes de viol.
Il faut avancer, toujours... Pas le temps d'appuyer sur pause.

On te juge sur ton comportement, ta façon d'être, ta manière de t'habiller, alors qu'on ignore tout de ta vie.

Et peut-être que ton comportement, tes vêtements et tout le reste, sont justement liés à tes traumatismes...

Mais personne ne parle de ça.

On n'est pas censé en parler. On n'est même pas censé le montrer.

La vie doit continuer, le monde doit avancer.
Et toi aussi, tu dois continuer, avancer...

Parce qu'il faut jouer le rôle. Et ici, chacun joue le sien.

Il n'y a pas la place pour le traumatisme, pas le temps d'expliquer son état. C'est du privé, ça ne regarde personne.

Et pourtant, ça définit une partie de notre vie, au jour le jour...

Il y a des jours où ça va, et d'autres où ça ne va pas.
Ça change souvent, ça change tout le temps... Parce que c'est comme ça, en vrai, la vie d'une personne violée.

Aujourd'hui peut-être, c'était une mauvaise journée parce que tu as eu des cauchemars, des flash-back... Et donc tu a été moins attentive à ce qui se passe autour, plus fermée, tu avais l'air moins sympathique.

Mais en société, il faut tout donner, être ok tout le temps, ne pas s'arrêter, continuer, et faire comme si... C'est ce qu'on demande à tout le monde, donc on te le demande à toi aussi.

Et il paraît que tout le monde y arrive, donc tu devrais y arriver aussi.

Si ça ne va pas, il faut savoir passer à autre chose. Comme en un claquement de doigts.
Si tu ne sais pas le faire, c'est que tu es définitivement trop faible, ou bien flemmarde.

Quand tu ne t'en sors pas, l'échec vient forcément de toi.

Alors que le principe du traumatisme, c'est qu'il revient, il te hante. Et passer à autre chose est la pire des solutions.
Faire comme si est la pire des choses...

Et il faut, pourtant, être bien habillé, bien coiffé, et toujours de bonne humeur, sociable, et puis productif aussi.
Parce que c'est important.

Le trauma, rien à foutre, parce que ce n'est pas un handicap qui se voit, parce qu'ils s'imaginent que c'est comme tout le reste.
Alors ils te disent : la vie est difficile, c'est comme ça pour tout le monde, il faut faire avec.

Mais la vérité, c'est qu'ils ne savent pas. On n'est pas réglé comme eux. Ce qu'ils appellent "difficile", ce n'est rien, ce n'est pas ça.
Ce que nous vivons, nous, c'est l'enfer. Et à ça, on ne s'habitue pas.

Cette société n'est pas faite pour les victimes de viol.
Elle ne sait pas les prendre par la main pour les aider à se réparer, aussi lentement que possible, car il faut prendre le temps pour redonner confiance.
Il faut prendre le temps pour réparer le trauma.

mercredi 30 novembre 2022

Mercredi 30 novembre 2022

 

Une seule victime parle et on ne la croit pas.
Quand dix victimes parlent, on ne les croit pas plus.

"Présomption d'innocence", c'est tout ce qu'ils savent répliquer pour parer aux accusations...

Et aussi, "laissons la justice faire"...
Mais la justice, elle laisse en liberté bien trop de criminels pour qu'on lui fasse confiance.

Ainsi, le nombre de victimes ne suffit pas... Parce que ce sont des femmes, tout simplement, peut-être ?

Nous vivons dans un pays où la parole des femmes est mise en doute, de même que la parole des enfants quand ils dénoncent avant la prescription. Ce n'est jamais le bon moment pour parler, parce qu'on n'est jamais crus.

Seule la parole de l'homme compte, et quand un homme dit qu'il est innocent, on le croit...

Un homme seul suffit à établir n'importe quelle "vérité".

Mais une vérité qui sortirait de la bouche d'une femme, on la remet en cause, on la remet en doute.
On la renvoie dans les cordes de la justice, qui se fera un plaisir de la tacler pour la mette définitivement K.O.

Après des années de lutte pour l'écoute et l'égalité, on en est toujours là...

lundi 7 novembre 2022

Lundi 07 novembre 2022

 

Je vis dissociée de mon passé.

Ça veut dire que je suis capable de vivre la plupart du temps comme si rien ne m'était arrivé, et comme si tout allait bien dans le meilleur des mondes...

Mais parfois (souvent), le passé frappe à la porte pour me dire : tu as été violée, c'est réel, et voilà tout ce qui ne va pas bien chez toi depuis...

Le traumatisme remonte alors comme s'il venait tout juste de se produire.

Les émotions qui vont avec, aussi.

Et ma vie telle que je la vis au présent m'apparaît comme mensongère.

Il semble que la seule solution pour que j'aille mieux, c'est que j'accepte ce passé comme faisant partie intégrante de ma vie.

Que j'accepte cette fille violée comme étant moi et non pas une fille du passé, une autre séparée de moi.

C'est pourtant bien plus facile de vivre ma vie en faisant comme si ce qui était arrivé ne m'était pas arrivé à moi...

Mais on ne peut pas vivre comme ça.

Quand je pense au trauma, quand j'essaie de le regarder bien en face, j'ai toujours la nausée, le dégoût, la colère, l'impression de mourir, et l'envie de mourir.

Je ne peux pas.

Le passé est mieux loin, dans un autre univers, le plus loin possible de moi.

Et pourtant, pour aller mieux il semble que la seule solution soit d'accepter.

Pouvoir dire "oui, c'est bien arrivé", mais surtout "ça m'est bien arrivé à Moi".

C'est tout sauf quelque chose de réellement facile à faire.

J'ai remarqué que je suis la seule à refuser autant mon passé.

Les personnes qui m'aiment, elles, m'acceptent entière et telle que je suis, avec ce passé.

C'est étrange.

Et significatif : je n'aime pas mon  passé, je ne l'accepte pas, donc je ne m'aime pas.

Je manque de bienveillance envers moi-même.

Les personnes qui m'entourent sont bien plus aimants envers moi que moi envers moi-même...

J'espère changer ça. Vraiment.




lundi 26 septembre 2022

Lundi 26 septembre 2022

 

Que faire de ces personnes amies avec nos agresseurs ?

Faut-il pardonner, laisser couler, prendre sur soi ?

Faut-il chercher à les comprendre ?

 

C’est pas de leur faute, après tout, s’ils n’arrivent pas à choisir entre la victime et l’agresseur…

 

C’est pas de leur faute, peut-être, de ne pas voir le prédateur derrière le masque de la sympathique personne.

Ils sont aveuglés, embobinés, sans doute…

 

Ou bien, peut-être que si, que c’est de leur faute aussi… Parce qu’ils ne font pas l’effort, n’ont pas envie d’écouter la victime.

 

Parce qu’ils n’arrivent pas à décider.

 

Après avoir longtemps hésité, après m’être penchée sur la question, j’ai compris que c’était une question de survie et que je devais trancher pour eux s’ils ne savaient pas choisir.

 

Je ne peux plus garder dans mes contacts, ou dans mon entourage, des personnes qui restent proches d’un prédateur.

Des personnes qui font ce choix, même quand elles savent ce qu’il est.

 

Ils pourront dire ou penser ce qu’ils voudront à mon sujet.

Je dois avant tout me protéger.

 

Sauvegarder ma santé mentale, c’est me tenir le plus loin possible de tout ça, et surtout de la personne qui m’a fait le plus de mal.

Sauvegarder ma santé mentale, c’est faire des choix à la place de ceux qui ne savent pas les faire.

 

Parce que dorénavant, ma santé et mon bien-être passeront avant toute chose, et avant eux surtout.

 

lundi 29 août 2022

Lundi 29 août 2022

 

 

Ces mots que l’on mérite d’entendre,

Ces mots qu’il nous faut intégrer…

 

Tu n’es pas sale

Tu n’es pas de trop

Tu mérites d’exister.

 

Tu as droit au bonheur,

A l’amour,

 

Tu es importante.

 

Juste ces mots…

 

Difficile d’y croire, et de se sentir à sa place.

Difficile de se donner le droit de vivre, pleinement.

Et difficile de s’aimer.

 

Pourtant,

 

Tu n’es pas sale

Tu n’es pas de trop

Tu mérites d’exister.

 

Aime-toi

Et laisse-toi être aimée.

 

jeudi 25 août 2022

Jeudi 25 août 2022

 

Quand on raconte, on raconte les gestes, peut-être les endroits du corps.

Mais surtout, on dit « Ça ».

 

Quand on raconte, on dit :

« J’ai attendu que Ça se termine »

« Et puis Ça s’est terminé »

« J’ai l’impression que Ça a duré longtemps »

 

On ne dit jamais le mot.

Il se laisse deviner.

 

Parfois, le mot sort de la bouche des autres.

« Viol ». « Agression sexuelle ».

 

Oui, certainement, sans doute… Mais de notre bouche, le mot sort rarement.

Même quand on sait, d’après la définition légale.

 

Peut-être parce que Viol ou Agression sexuelle, ça ne raconte rien. C’est froid, chirurgical, ça ne dit pas assez ce qui s’est passé réellement.

 

Nous, on a ressenti des gestes, des mouvements, qui nous ont marqués, traumatisés.

Qui restent écrits sur notre corps, dans notre peau. Gravés dans notre tête.

 

On raconte les gestes, parce que ce sont eux qui décrivent le mieux.

On dit « Ça », parce qu’il n’y a pas d’autre mot, pas de définition possible finalement.

 

Ça se traduit par viol, ou agression sexuelle, peut-être.

 

Mais Ça, c’est surtout la violence à l’état pur, la pénétration de l’intime.

Quelque chose qu’on n’a pas voulu, qu’on a refusé, et qui a forcé le passage, qui s’est imposé à nous.

 

Après Ça, il ne reste qu’un esprit éclaté en morceaux, un corps abandonné de lui-même, une explosion de l’être.

Alors quand on raconte, on ne dit pas vraiment les mots, parce qu’il n’y en a pas pour décrire Ça.

C’est une affaire de sensations avant tout, bien plus que de mots.

 

Les mots que les autres utilisent pour en parler généralement, ou de manière légale, signifient peu de choses et ne rendront jamais compte de que c’est réellement que de vivre Ça.