jeudi 24 octobre 2019

Jeudi 24 octobre 2019


Des morceaux éclatés, et tout autour le vide.
Voilà comment je me sens, la plupart du temps.

Je ne sais pas qui je suis, je ne sais pas ce que je suis en dehors de ce que les abus sexuels ont fait de moi.

J’essaie de m’occuper, de faire des choses.
Il y a les gens autour de moi, mon mari, ma fille, mon entourage.

Mais quand je suis seule je me sens vide, une coquille vide.
J’ai l’impression que rien de ce que je fais ne me remplit, que rien ne remplira jamais ce vide.

Parfois je me sens comme au-dessus de ce gouffre et j’ai l’impression que je vais tomber.
Je sais que si je tombe, je perdrai pied, définitivement.
Si je regarde, ne serait-ce qu’une seconde de trop, je suis déjà perdue.
C’est la nuit noire là-dedans, une nuit mortelle.

Alors, avec mes morceaux éparpillés, je fais de mon mieux pour l’éviter.

Tout ce que je fais de ma vie, c’est pour ne pas tomber dans le trou.
Un trou creusé pour moi par mes abuseurs.
Peut-être qu’ils m’attendent là en bas.
Peut-être qu’il n’y a rien d’autre que la folie pure de toutes les horreurs qu’ils m’ont faites.

J’ai pleuré aujourd’hui.
Le psychologue a essayé de me montrer que j’étais quelqu’un, mais moi c’était tout ce que je voyais : le trou, le vide.
J’ai l’impression de n’être que ça. J’ai l’impression qu’il n’y a que ça.

lundi 21 octobre 2019

Lundi 21 octobre 2019


Je pense aux abuseurs.
A la manière dont ils entrent dans nos têtes pour parasiter la moindre de nos pensées.
Ce mode d’emploi de destruction qu’ils laissent en nous, que nous retournons généralement contre nous, mais que nous pouvons aussi retourner contre les autres.

Je pense au fait que j’aurais pu faire beaucoup de mal si j’avais utilisé leur savoir-faire pour manipuler et détruire les gens.
Et comment ça se fait que je n’ai jamais fait autant de mal qu’eux, que je n’ai jamais choisi cette voie ?

Ça veut dire qu’on peut choisir de faire le mal ou non.
Ça veut dire qu’ils ont choisi leur camp. Et nous, le nôtre.

Mes abuseurs sont en moi. Est-ce que je suis en eux aussi ?
Est-ce qu’ils voulaient me voler la partie pure de mon âme ? Comme des vampires ?
Je pense que c’était ça qu’ils voulaient.

Je pense que c’est ce qu’ils essaient de voler quand ils font ce qu’ils font.
Sucer l’innocence. Violer la bonté.

Quelle magie, quel mystère nous permet de ne pas devenir comme eux, aigris, mauvais, fermés, méchants ?
C’est ce que je voudrais savoir.

Quand, malgré tout ce que l’on a vécu, malgré tout ce qu’ils nous font subir, nous gardons en nous une place pour l’amour, l’espoir, la vie…

Nous savons garder cette pureté, ils ne nous l’ont pas volée, elle reste en nous pour toujours.

dimanche 20 octobre 2019

Dimanche 20 octobre 2019


C’est étrange de sentir les blessures se fermer une à une, de sentir chaque point se consolider.
Plus la honte change de camp, et moins j’ai peur de vivre.

« Tant que tu respires, tu te bats », j’ai entendu cette phrase dans un film.

Tant que tu respires, tu te bats…
J’ai respiré jusque-là, tant bien que mal, dans un carcan qui me serrait jusqu’à m’étouffer.
En parlant, je me suis libérée et chaque jour je respire de plus en plus facilement.

La vérité éclate comme du verre et blesse un peu plus chaque fois ceux qui m’ont fait du mal.
A leur tour désormais, de sentir l’étau, d’étouffer à n’en plus pouvoir.

« Tant que tu respires, tu te bats. »
Il ne faut jamais oublier ça.
Ce petit souffle de vie en nous, qui peut grandir et grandir encore.

vendredi 18 octobre 2019

Vendredi 18 octobre 2019


Je me rends compte que tous mes sentiments négatifs ou toutes mes réactions négatives me viennent de ce que mes abuseurs m’ont transmis.

Et d’un abuseur en particulier, celui dont je me souviens, que j’ai connu le plus et que j'ai aimé.
Comme s’il m’avait donné tout ça.

En ce moment, je m’interroge dès que je ressens une pression, une colère, un sentiment de honte ou de nervosité.
Je me demande d’où ça me vient…

En observant mon passé je prends conscience que lui était comme ça, que lui réagissait de la sorte avec moi.

Et j’ai intégré un schéma incorrect où j’ai l’impression que tout le monde agira et répondra de cette manière malsaine chaque fois que j’essaierai de communiquer quelque chose, ou bien que moi-même je vais agir de la sorte…

C’est notamment le cas quand je suis avec le psychologue, quand je me dis qu’il ne voudra plus me voir après que je lui aurais dit certaines choses, ou bien qu’il va me détester pour avoir dit ou fait quelque chose.

Je m’en rends compte avec le psychologue, mais en réalité c’est avec tout le monde que je reproduis ce schéma biaisé.

Il me faut alors réfléchir, comprendre, qu’est-ce qui est à mes abuseurs, et qu’est-ce qui est à moi.
Comment moi je ressentirais les choses si je ne les avais pas intégrées comme ça.

Il me faut retrouver un lien honnête avec les autres, sans peur de leur jugement, de leur haine ou de ce qu’ils pourraient me faire de mal. Parce que ça, c'est le schéma de l'abuseur.
Je dois chercher la connexion naturelle, la confiance, l’amour.

Défaire, encore et encore ce que j’ai appris, intégré, fait mien, pour retrouver ce que je suis, ce qui me fait Moi sans tout ça.

jeudi 17 octobre 2019

Jeudi 17 octobre 2019


J’ai fabriqué une armure pour me protéger du monde.
Une barrière entre moi et les autres, pour éviter qu’ils me fassent souffrir.
Je la porte sur moi et je me sens bien, à l’abri de tout.

Avec elle, je me sens forte.
Ainsi je ne m’attache à rien, et rien ne peut m’atteindre.

Il arrive que je la laisse au placard, que je m’abandonne, quand je me sens En confiance… Et rares sont les personnes qui ont pu me voir ainsi nue.

J’ai fabriqué une armure, mais elle est en papier.
Elle me protège de quoi ?
Finalement, de rien…

On se croit armé, mais tous les vents s’engouffrent.
On se croit solide, mais on reste fragile.

J’ai fabriqué une armure, je pensais que c’était mieux comme ça.
Je pensais que ça faisait moins de souffrance.

En réalité, non seulement elle est inefficace, mais elle m’empêche de vivre.
A vouloir s’éloigner de tout, ne prendre aucun risque, on ne profite de rien…