samedi 20 juillet 2019

Samedi 20 juillet 2019


J’ai du mal avec le fait de raconter, aller jusque dans les détails, dire « ceci est ma vie »…
Ceux qui écoutent mes déclarations les reçoivent sans doute comme des coups de poings, mais pour moi c’est juste MA vie, MA réalité.

En face, celui à qui je m’adresse aura le souffle coupé pendant peut-être cinq minutes, puis il retournera à sa normalité, sa vie à lui.

Moi, le souffle coupé, c’est tous les jours, tout le temps, dès qu’un souvenir me revient… et bien plus que ça encore.

Je choisis les mots avec soin pour que mon interlocuteur comprenne bien les gestes, les sensations, mes sentiments à moi et la violence, surtout la violence.

Je choisis mes mots et je m’entends parler.
Au fur et à mesure le film repasse dans ma tête, et l’horreur se fait plus précise.

Je rêverais d’être à leur place, à la place de ces gens qui ne font que recevoir nos confidences, et puis qui passent à autre chose…

Eux aussi, ils ont les images ?
Mais est-ce que ça leur fait mal comme à moi ?
Est-ce qu’ils sentent la douleur ?
Sans doute, mais jamais assez, ils ne la sentent jamais assez par rapport à ce que nous vivons…

En un sens, je me sens chanceuse : je n’ai pas, comme eux, à écouter les mêmes atrocités, des histoires similaires à longueur de journée…

Je n’ai que mon histoire, et même si c’est dur, je m’y suis habituée… J’ai grandi avec l’horreur, on a fait du chemin ensemble, elle fait partie de moi.

Je crois que ceux de l’extérieur, ceux dont c’est le travail, ne s’habitueront peut-être jamais.

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